Même si c'est en toute bonne foi que le sujet vient demander une analyse, il est malgré tout mené par le bout du nez de son inconscient, qui lui, n'aime pas trop les changements. Même si cela peut paraître choquant, tous ces symptômes qui le font tant souffrir, ont été mis en place par son inconscient comme étant « la meilleure solution pour éviter un plus grand malheur »? Mais le problème, c'est que tout cela a été mis en place en grande partie durant les premières années de notre vie, c'est-à-dire à un moment où nous savions si peu de choses de la vie, où nous avions peur d'être abandonnés à notre sort, où nous savions à peine marcher et balbutier quelques mots... Le malheur, c'est que toute cette construction (appelée le Fantasme) reste d'application? à vie ! C'est un peu comme si nous étions contraint d'habiter une maison dont l'architecte était un enfant de 4 ans ! évidemment, on peut s'attendre à ce que certains éléments, avec le temps, ne résistent pas bien à l'usure. Mais on ne déménage pas si facilement, car cette maison, on s'est habitué à « faire avec », même s'il ne fait pas si agréable que cela y vivre, c'est toujours mieux que de se retrouver sans toit. On peut comprendre alors que pendant la psychanalyse, on ait peur qu'on touche à cette maison ; on craint l'effondrement, on craint en fin de compte le changement. Alors, quand on s'aperçoit que des choses commencent à changer, que notre comportement n'est plus le même qu'avant, qu'on perd certains symptômes, il s'en suit en général une forme ou l'autre de résistances, qui s'expriment ainsi:
- "Oublier" de venir aux séances, ou tomber malade comme justification de cette absence.
- Arriver en retard (pour écourter l'épreuve de la séance).
- Partir en vacances pour «souffler un peu» (et essayer d'oublier ce qu'on vient de découvrir).
- Interrompre l'analyse sans chercher à comprendre pourquoi on réagit ainsi. Cette dernière résistance est la plus grave, car en reculant devant l'épreuve, on renforce encore plus ses résistances, et encourage une répétition future.
- Parler théorie psychanalytique plutôt que de parler de soi-même.
- Oublier ses rêves? ou bien le contraire, venir avec un rêve à chaque séance.
- Critiquer la personne même de l'analyste, ou la psychanalyse en soi : «c'est parce que je sens que vous n'êtes pas assez compétent que je vais rater mon analyse», ou bien «je perds mon temps ici, comment voulez-vous que simplement en parlant je guérisse de mon ulcère?»
- Ou bien, pour reprendre un exemple de Freud: "Le tic-tac de l'horloge de l'appartement d'à côté m'empêche de me concentrer?"
- etc. etc.
Toutes ces tactiques ont le même but : éviter le changement. On préfère un malheur bien connu à une autre chose, mais inconnue. Peur de devenir quelqu'un d'autre ? «d'ailleurs les gens autour de moi disent qu'ils ne me reconnaissent plus.»
Mais gardons bien ceci à l'esprit : si on vient en analyse c'est pour changer quelque chose qui nous était lourd à porter. On change, c'est vrai, mais en fin de compte c'est pour se retrouver soi-même quelque part, pour se réconcilier avec soi-même, mais jamais on ne se perd.
--- © Ilmi Manuka ---